SOMMAIRE : Edito. 2 – Spécial Mutations. 3 – Promotions d’échelons.
Depuis plus de vingt ans, quasiment sans
interruption, Monsieur Christian FORESTIER occupe les fonctions les plus
élevées. Son étiquette politique ne fait aucun doute. Il appartint à la vague
de recteurs nommés par François Mitterrand, immédiatement après son élection. Proche de Laurent Fabius, il
ne quitta plus, dès lors, le cercle des hommes de pouvoir de l’Education.
Christian
Forestier est avant tout un militant de la gauche qui a imprégné l’Education
nationale, notre académie en particulier, depuis des décennies, de ses idées claniques.
On peut
penser que, pour changer de politique, il faut d’abord changer les
hommes : du moins ceux qui ont eu la charge de la définir. Nombreux sont
donc ceux qui s’interrogent sur le maintien de Christian Forestier aux plus
hauts postes de la première administration française - par un gouvernement de
droite.
Notre
devoir de syndicaliste est de rester à l’écart de cette polémique politicienne
pour préserver notre indépendance vis à vis de tout parti politique, mais il
est vrai aussi que nous ne pouvons que dénoncer toutes les dérives de pouvoir,
celles de ces gens d’en haut qui proposent sans discontinuer de casser notre
système éducatif pour garder le pouvoir et affirmer leur prétention permanente
d’être plus intelligents que les gens d’en bas.
La
nomination de Christian Forestier à la tête du HCEE par le Ministre Ferry est avant tout un coup
politique riche de symboles. Qui à la
place de Christian Forestier, représentant de la « gauche
intellectuelle », aurait pu rassurer les défenseurs du collège unique et
promouvoir la scolarité obligatoire jusqu'à l’âge de dix huit ans pour introduire
massivement l’apprentissage patronal dans la culture de notre système éducatif,
pour déverser la haine et le mépris contre l’enseignement professionnel public
et laïque, pour cautionner la réforme universitaire en veillant à la main mise
de son clan sur la maison Education nationale ?
Voici quelques morceaux choisis de ses pensées politiques, « éducatives» :
De l’enseignement professionnel :
« (…) L’enseignement professionnel (…) je
connais un peu. Pour une formation porteuse, il y a quatre formations poubelles
(…)».
« Vous ne savez pas de quoi vous parlez : beaucoup de ces classes sont
des classes poubelles ! Arrêtons la langue de bois ! (…) Je trouve dégueulasse de dire que la
filière professionnelle est une filière d’excellence. », « (…) ça fait
très bien d’expliquer dans les médias que les LP sont une voie d’excellence,
mais la réalité des LP (…) : ce sont de petites beurettes qui auraient pu faire
des études plus longues si seulement on leur en avait donné l’opportunité ».
Du collège unique :
« Tous les systèmes éducatifs qui
enregistrent des performances supérieures aux nôtres (…) ont fait le choix
d'une école obligatoire unique, avec souvent des contraintes dans son
application bien
supérieures à ce qui se passe chez nous (absence
de redoublement par exemple)».
De la « révolution
sociale» :
« Les plus indulgents diront qu'il est
heureux que l'on ait développé les baccalauréats technologiques et
professionnels ; les plus sévères diront qu'ils ont surtout été utilisés pour
protéger l'élite sociale. »
« Le choix de l'enseignement
professionnel sous statut scolaire nous a un peu éloignés de la réalité de
l'emploi et nous avons un enseignement professionnel à deux vitesses : un
enseignement correspondant aux métiers
manuels, de grande qualité, avec une
très bonne capacité d'insertion, mais
sans élèves (exemple : les métiers du bâtiment), et un enseignement sans
véritable professionnalisation, avec une capacité médiocre d'insertion, mais accueillant
massivement. Les filles paient un lourd tribut à cette politique ».
« Si l'objectif de réduire les sorties
sans diplôme peut être assez consensuel, celui de donner enfin la priorité aux
formations les plus générales au détriment des formations professionnelles
courtes sera probablement beaucoup plus discuté, tant il se heurte à toutes les
idées reçues. Mais l'on n'a jamais réussi à expliquer comment on pouvait
construire une formation professionnelle, autre que manuelle, sur un échec de
la formation générale. »
De l’apprentissage :
« J’ai enfin quelques regrets sur le
fait que la Région n’utilise pas toutes les possibilités offertes par la loi de
1983. On a trop focalisé sur la structure CFA proprement dite, en négligeant des
dispositifs plus légers de type UFA ou sections d’apprentissage… Ce qui
entraîne cette question pour l’enseignement supérieur : faut-il aller vers des superstructures très fortes ou faut-il inscrire l’apprentissage dans le patrimoine
génétique des établissements
? »
« Tout le monde
s’accordera sur le fait qu’il s’agit d’une pédagogie différente, issue de la
conviction que l’école n’a pas le monopole de la formation et qu’il peut y
avoir des situations de travail qui permettent d’acquérir des connaissances et
des compétences. Cette forme de pédagogie doit préserver la qualité des
formations délivrées hors situation de travail et apporter un supplément en
termes de socialisation ».
De la réforme de
l’Université :
« Pour bâtir un enseignement supérieur
européen, il y a deux méthodes : la bonne et la mauvaise. Soit on demande à
chaque pays de saborder son système au profit d’un modèle unique et la
probabilité de faisabilité est nulle. Soit on profite de la mise en place de
nouvelles formations pour aller, un jour, vers un modèle plus harmonisé qu’il
ne l’est aujourd’hui et c’est la bonne stratégie, celle qu’adopte notre
ministre avec l’opération Bac + 3, Bac + 5, Bac + 8. Et là, les entreprises,
avec la vision globale qu’elles développent, depuis un certain temps déjà,
peuvent nous aider ».
Chers
collègues, vous comprenez bien que le premier objectif du Haut président est de
biaiser le débat sur l’école avant qu’il commence, d’assurer au dessus des uns
et des autres sa haute protection sur
notre maison qu’est l’Education.
Monsieur le
Ministre de l’Education peut-il souhaiter mieux que ce soutien d’une
éminente personnalité du grand sérail pour faire taire toutes les contestations
des gens du bas?
Le Secrétaire Académique